samedi 24 décembre 2016

Si la lune éclaire nos pas, de Nadia Hashimi





Deuxième roman de cette auteure américaine d’origine afghane, après «  La Perle et la Coquille » que j’ai beaucoup aimé.

Même sentiment pour cette histoire à l’écriture profondément humaniste, sensible et touchante.

Le récit débute à Kaboul et se transporte ensuite à travers des chemins d’exil jusqu’en Angleterre. C’est l’histoire d’une famille afghane jetée dans l’inconnu, obligée de tout laisser derrière elle pour sauver sa vie, espérer un avenir meilleur que celui qui lui est promis sous le régime des Talibans.

Tout ça est terriblement d’actualité, c’est l’histoire de milliers de réfugiés à travers le monde, tous ces gens qui décident, bien souvent malgré eux, de tenter un coup de poker, de tout recommencer dans un pays de paix, en laissant tout ce qu’ils possèdent derrière eux.
Ils sont souvent considérés comme des cheveux sur la soupe dans des sociétés ayant déjà ses propres difficultés. Mais quand l’horizon est totalement bouché, qu’on tremble tous les jours, qu’on vit la boule au ventre dans l’attente d’une incursion agressive et d’une exécution, il ne reste que la fuite, ailleurs, loin, peu importe les difficultés, les dangers, peut-être même la mort, tout sauf l’immobilité résignée.

A travers une famille afghane, Nadia Hashimi nous entraîne dans le quotidien des sans-papiers clandestins, leurs misères, la crainte permanente d’être renvoyés à leur point de départ, démunis, séparés des leurs, perdus.

Ce roman est aussi une incroyable leçon de courage, de persévérance, de foi et d’amour. Le besoin de survie, d’espérer et de retrouver sa famille peut insuffler la force de déplacer des montagnes, même pour un enfant…







vendredi 16 décembre 2016

La Perle et la Coquille, de Nadia Hashimi




Nadia Hashimi rejoint désormais le rang des écrivains afghans de talent, aux côtés de Khaled Hosseini.

Je me revois la semaine dernière, dans ma médiathèque, avec les deux romans de Nadia Hashimi, en train de dire «  de sacrés pavés ! » à l’attention de l’employée qui m’a répondu : «  ah mais quand c’est passionnant on ne voit pas les pages défiler ! ».

Hé bien oui, ce fut le cas pour La Perle et la Coquille. Je n’ai pas senti le poids du pavé tellement sa lecture a été prenante.

Un magnifique roman de femme, pour les femmes. Les afghanes et les autres. Toutes celles qui vivent dans une société patriarcale, où leur existence est tolérée à condition qu’elles remplissent leur part de marché, engendrer des fils…

Sans enfants, elles ne sont que fardeaux, des bouches de plus à nourrir. Celles-là ont un avenir tout tracé, celui d’être des domestiques. Quoique, même mariées et mères elles le sont, des domestiques, pour leur époux, leur belle-mère, les autres épouses. Une vie de labeur entre quatre murs, usées et maltraitées.
Lorsque des traditions sont aussi ancrées dans une société, il est très difficile d’en sortir, surtout quand tout contribue à maintenir un carcan en place. La faute aux hommes qui ont peur de se faire doubler, mais aussi aux femmes qui perpétuent ce qu’elles ont vécu, comme si leur destin était immuable.

Cette histoire relate tour à tour un morceau de vie de deux femmes, l’une ayant vécu au début du 20ième siècle, et celui de son arrière-arrière-petite- fille. En un siècle peu de choses ont changé dans le quotidien de la majorité des afghanes. Toujours les mêmes obligations, la même obéissance, la même soumission.

Le mérite de ce livre est aussi de m’avoir fait connaitre la tradition du «  bacha posh », qui consiste à déguiser de petites filles en garçons, dans les familles qui ont eu le grand malheur de ne pas avoir de fils, afin qu’elles puissent  accomplir certaines choses normalement interdites aux filles. Aider à faire les courses, travailler, escorter leurs sœurs si elles doivent sortir de la maison..

Etre bacha posh est une fenêtre de liberté pour ces fillettes qui goûtent enfin au monde des garçons. Tour leur est alors possible : courir dans la rue, jouer au ballon, aller à l’école et plus de corvées domestiques.

Mais comme toutes les bonnes choses ont une fin, il faut un jour redevenir fille, avec tout ce que cela implique. Il faut alors apprendre à être femme et se préparer au mariage.

Certaines scènes dans ce roman sont très dures, cruelles, poignantes, à l’image de ces vies malmenées. C’est un vibrant témoignage de tous ces destins qui se répètent, mais c’est aussi un hommage à la force et au courage des femmes qui osent relever la tête, celles qui veulent un avenir meilleur pour leurs filles, celles qui bravent l’ordre établi pour gagner un morceau de liberté.

Merci à Nadia Hashimi d’avoir été le porte-parole de ces millions d’ombres bleues réduites au silence…








mardi 8 novembre 2016

Darling, de Jean Teulé





Je ressors de cette lecture bouleversée, profondément touchée par l’histoire de Darling…

Darling, c’est l’histoire d’une femme qui aurait pu être banale, mais qui ne l’est pas.

Darling, c’est un appel désespéré à la tendresse, pour quelqu’un qui n’a connu que l’enfer.

Darling, c’est un témoignage dramatique retranscrit magnifiquement sous la plume de Jean Teulé.


Quand on a eu une vie «  normale », qu’on a eu la chance de grandir dans une famille aimante et équilibrée, il est très difficile de s’imaginer que pendant ce temps, d’autres vivent un destin tragique.

La petite Catherine, alias Darling a vu le jour dans la merde et l'a traînée ensuite derrière elle comme une malédiction.

Au fil de ma lecture, j’ai été saisie de dégoût et ça a empiré de façon exponentielle, associé à la révolte, mais aussi à l’admiration. Pourquoi ? Hé bien parce que cette petite normande est une force de la nature, une battante qui se résigne parfois, mais qui n’abandonne jamais.

Jean Teulé, avec son humour grinçant bien connu, a très bien rendu l’ambiance rurale d’un coin paumé de Normandie. L’histoire d’une famille décousue, violente et haineuse…tellement pourrie que même la fratrie ne cherche pas à se serrer les coudes. C’est chacun pour sa gueule et sauve qui peut.

Mais le hic avec une malédiction, c’est que ça a tendance à étendre ses racines, comme la pourriture qui contamine un même sang, solidarité familiale oblige. Et il faut beaucoup de volonté à qui veut redresser la barre et changer de cap…

En tous cas, chapeau Darling.






jeudi 27 octobre 2016

"Mille femmes blanches, suivi de " La vengeance des mères", de Jim Fergus




Je reviens tout juste d’un voyage à travers le temps. J’étais dans les grandes plaines nord-américaines, chez les Cheyennes…

A vrai dire, j’avais déjà lu «  Mille femmes blanches » il y a quelques années, mais comme la suite a été publiée, je me suis dit que ce serait bien de me rafraîchir la mémoire, et j’ai bien fait ! « La vengeance des mères » est en effet sa suite immédiate, sans délai chronologique.

Pour les impatients, il est toutefois possible de se plonger dans le deuxième tome sans relire le premier, car l’auteur a judicieusement rappelé les faits importants tout au long de son récit.

Les deux romans sont présentés sous forme de carnets de voyage, tenus par des femmes blanches.

Dans «  Mille femmes blanches » l’unique auteure des carnets est une certaine May Dodd, partie rejoindre une tribu Cheyenne avec d’autres femmes, suite à un appel lancé par le gouvernement américain, dans le but d’une intégration progressive des «  sauvages » dans le monde des blancs et d’apaiser les tensions entre les deux camps.

Dans «  La vengeance des mères », les carnets sont tenus par d’autres femmes, et nous y retrouvons certains personnages de la première partie de l’aventure, mais aussi de nouveaux, tout aussi attachants.

L’ensemble du récit se déroule en 1875 et 1876, juste avant le déclin définitif du peuple amérindien. 

A travers le regard de ces femmes blanches parties se marier avec des «  sauvages », nous entrons dans un monde inconnu, effrayant et déstabilisant au début, dans lequel il leur a fallu tout apprendre et s’adapter à un nouveau mode de vie. Toutes ces femmes vont finir par s’attacher à leur peuple d’adoption, une tribu cheyenne guidée par le grand chef Little Wolf. Elles deviendront des cheyennes presque comme les autres, et auront le même destin.

J’ai vraiment aimé cette lecture, j’ai aimé me plonger dans cette tribu et découvrir une petite partie de leurs us et coutumes, leur vision de la vie, leur adaptation parfaite à l’environnement, leur respect de la nature…
Seulement voilà, ce fut une période de grands troubles, une période de lutte contre l’envahisseur blanc, ce fléau de l’humanité ! Les caucasiens auraient certainement beaucoup appris au contact des amérindiens, mais ils ont préféré, comme à chaque fois, les éradiquer et convertir le peu qu’il reste en bons petits «  blancs ».

Bien sûr que les coutumes des différentes tribus n’étaient pas parfaites, bien sûr qu’il y avait certains actes barbares, mais n’est-ce pas le cas dans toutes les sociétés humaines ? C’était leur vie et eux au moins avaient l’intelligence de vivre en bonne harmonie avec la nature, contrairement au très civilisé homme blanc.

Ce que les caucasiens ont fait aux amérindiens est une honte, un crime contre l’humanité. Ils se sont toujours comportés comme une tâche d’huile qui s’étend et engloutit tout sur son passage. Dès qu’ils ont foulé le sol de ces terres sauvages, ils ont apporté avec eux la mort et la désolation, en commençant par les maladies qui ont décimé un grand nombre de natifs, puis l’alcool qui a fait des ravages, l’abattage de bisons et d’une grande partie de la faune sauvage.
Plus de gibier, plus de terres, plus de liberté... et pour finir ils ont été parqués comme des animaux dans des réserves, obligés de renier leur culture et leur histoire, condamnés à l’oisiveté et à la pauvreté.

Le même schéma s’est produit dans d’autres parties du globe, comme en Australie avec les aborigènes ou en Nouvelle-Calédonie.

Ce récit en deux tomes est magnifique, bouleversant, passionnant et j’aurais bien aimé qu’il y ait un troisième tome, j’aurais aimé rester avec les Cheyennes quelques jours de plus.
Le récit et le prologue se terminent d’une façon étrange, mais je trouve que ça colle parfaitement à l’esprit des amérindiens de l’époque, et c’est très bien comme ça.

Bonne lecture.



samedi 10 septembre 2016

Charly 9, de Jean Teulé





Première lecture pour cet auteur…et j’en redemande !

C’est l’histoire de Charles IX, le tristement célèbre roi de la Saint Barthélémy…

Le roman est assez court, 219 pages, centré essentiellement sur cet évènement tragique qui  sonna le glas du règne de Charly 9. Tout ce qui suivit, jusqu’à la mort du monarque deux ans plus tard, ne fut que mort et désespoir.

En lisant les premières pages, j’ai été assez déconcertée par la plume  de l’auteur, je l’avoue. Je m’attendais à un style très travaillé, qui collerait plus à l’idée que l’on se fait habituellement du parler des gens de l’époque, même si évidemment ce n’est pas le cas, car on serait sans doute bien en mal de comprendre le vieux français du 16ième siècle. Bref, tout ça pour dire que j’ai été déroutée en lisant les dialogues entre grands Seigneurs utilisant nos expressions courantes, et nos grossièretés usuelles.

Passé ce premier étonnement, on se détend et on se laisse porter par l’histoire. Le sujet est grave, mais il est traité avec légèreté, et Jean Teulé manie bien l’humour, si bien que même ce roi fou m’a paru sympathique. Pour dire vrai, j’éprouve de la pitié pour lui… Quelle vie, quelle époque, quel fardeau sur les épaules d’un jeune homme d’à peine 22 ans, si mal entouré, si mal aimé…


Cette partie de l’histoire a été bien racontée, de manière très vivante et imagée. Du coup je me dis que les romans historiques devraient être au programme des cours d’histoire pour nos enfants. Je pense que les événements marquants ainsi que les personnages célèbres seraient beaucoup mieux compris et mémorisés. Oui, je suis persuadée que les auteurs de romans historiques ont un grand rôle à jouer dans la transmission du savoir.

Bonne lecture. 


vendredi 19 août 2016

La ménagerie du bout du monde, de Carol Birch






Un roman traduit de l’anglais par Carole Delporte. Editions Terra Nova.


Quand j’ai acheté ce roman, je me baladais innocemment dans une grande surface, sans intention particulière d’acquérir quoi que ce soit. Mes pas m’ont conduit, par hasard, dans le rayon des livres…

Dès que je l’ai vu, il a fallu que je le prenne, voilà.

Sa magnifique couverture et son titre étaient une invitation au voyage et à la rêverie dans un autre temps.

Aujourd’hui je termine la dernière page avec un sentiment de gratitude envers l’auteure et ce magnifique cadeau qui est entre mes mains.

Carol Birch s’est inspirée de faits réels qui ont eu lieu au début du dix-neuvième siècle pour donner vie à des personnages fictifs. Le principal est le petit Jaffy et c’est lui qui nous conte cette fabuleuse aventure du bout du monde.

Le récit est d’une grande richesse, dans les événements extérieurs bien sûr, mais aussi et surtout dans les émotions, les états d’âmes, les réflexions personnelles…

Ce que va vivre Jaf c’est avant tout un voyage intérieur, un rite de passage de l’enfance vers l’âge adulte, une épreuve terrible, un tour de force de la Vie.

Tout au long de ma lecture, j’ai trouvé qu’il se dégageait une grande mélancolie de ce récit. Quelque chose de tenace, qui donne envie de se rouler en boule et de pleurer, mais aussi un appel à la liberté et une invitation à suivre ses rêves, toujours…



Bonne lecture.


jeudi 11 août 2016

Le lecteur de cadavres, d'Antonio Garrido




Amateurs de romans historiques, c’est par ici !

« Le lecteur de cadavres » est en fait plus que ça, puisqu’il est doublé d’un thriller remarquablement bien mené, passionnant, aux nombreux rebondissements.

En lisant ce roman de plus de 700 pages j’ai pris toute la mesure du travail que l’auteur a dû effectuer afin de nous livrer cette œuvre. Mêler fiction et faits historiques n’est certes pas  aisé, d’autant plus qu’il y a très peu d’éléments sur la vie  de celui qui est considéré comme étant le premier médecin légiste de l’histoire, hormis les nombreux traités scientifiques qu’il a légué à la postérité.

Song Ci de son vrai nom, a vécu dans la Chine du 13ième siècle, sous le règne de la dynastie Song.

Sous la plume talentueuse d’Antonio Garrido, le jeune Ci va évoluer dans une société souvent très violente et va vivre des situations difficiles à la poursuite de son rêve et de sa soif d’études. Brillant  et déterminé, il va côtoyer tour à tour la misère la plus totale et le faste de la cour impériale, nous livrant au passage des éléments de vie de cette époque, le contexte politique, l’organisation sociale et surtout les procédés d’analyse légale dont il va peu à peu révolutionner les méthodes.

Le thriller s’articule autour d’une série de meurtres mystérieux que le jeune Ci devra résoudre s’il veut sauver sa tête…

Je dois dire que j’ai eu un peu de mal à accrocher en lisant le premier quart du livre, car j’ai trouvé qu’il y avait quelques longueurs. J’ai un peu appréhendé en considérant le volume total du roman, mais ce fut le temps nécessaire pour installer l’intrigue, car passé ce délai j’ai eu beaucoup de mal à m’en décrocher !

Ce fut une lecture passionnante et très enrichissante, surtout pour amatrice de romans historiques et asiatiques comme moi !

Bonne lecture.





lundi 1 août 2016

Les dames blanches, de Pierre Bordage




Encore une belle rencontre avec mon auteur de science-fiction favori !

A travers ce roman, Pierre Bordage, ce grand humaniste, pointe encore une fois le doigt sur nos vilains défauts. Ces vilains travers qui finissent par former une fange immonde dans laquelle nous pataugeons lamentablement comme des insectes fous.

Pour illustrer son appel à la raison (une bouteille à la mer), il a mis en scène l’arrivée des Dames banches, ces grosses sphères venues d’ailleurs. Et là, tout s’enchaine…

Les comportements induits dans cette histoire sont tout à fait d’actualité, et ils sont même intemporels, puisque l’humanité a la fâcheuse tendance à répéter les mêmes erreurs.
Nous avons programmé notre autodestruction. C’est à se demander à quoi nous sert notre soi-disant intelligence.

Petit à petit, le décor tombe.
Nos « démocraties » montrent leur véritable visage. Les gouvernements imposent et sanctionnent. Les voix divergentes sont désormais affublées d’étiquettes ronflantes telles que «  terroristes », «  ennemis de l’humanité ». 
Tout est permis à celui qui a la loi de son côté, au détriment de toute logique. Les consciences sont verrouillées, bafouées, adieu humanité.

Pour en revenir au roman, l’histoire est bien rythmée et passionnante, comme d’habitude avec cet auteur. Je ne peux que recommander cette lecture à tous.




4ième de couverture:

Une étrange bulle blanche d'une cinquantaine de mètres de diamètre est découverte un jour dans une bourgade de l'ouest de la France. Elle attire et capture Léo, trois ans, le fils d'Élodie. 
D'autres bulles apparaissent, grossissent, et l'humanité échoue à les détruire. Leur activité magnétique de plus en plus importante perturbe les réseaux électriques et numériques, entraînant une régression technologique sans précédent
Seule l' « absorption » de jeunes enfants semble ralentir leur expansion...
La peur de disparaître poussera-t-elle l'humanité à promulguer la loi d'Isaac ? Mais peut-on élever un enfant en sachant qu'il vous sera arraché à ses trois ans ? 
Camille, qui a elle-même perdu un fils, et son ami Basile, d'origine malienne, ufologue de son état, vont essayer de percer le mystère des dames blanches afin d'éviter le retour à la barbarie.
Un livre poignant, dans lequel Pierre Bordage donne toute la mesure de sa passion pour les grands mythes fondateurs de l'humanité et sa haine des fanatismes.


mardi 21 juin 2016

Plateau, de Franck Bouysse




J’ai découvert ce livre grâce à l’excellente chronique de The big blowdown.

Ce qui a attiré mon regard et attisé ma curiosité c’est d’abord le titre, «  Plateau »…Titre énigmatique en vérité. Quel plateau ? Celui dont on se sert pour servir le thé et les p’tits gâteaux ? Ben non, c’est le petit cousin des plaines et des montagnes !

Et puis il y a la photo de couverture, avec cette vieille commode toute vermoulue et déglinguée, avec des photographies d’un autre temps posées dessus. Cette impression de poussière, de solitude, d’abandon…

Bref, je me suis donc jetée dans ce roman noir, pour en ressortir quatre jours plus tard, ravie.

La lecture a été un peu ardue au départ, j’avoue. C’est que l’auteur a un grand talent descriptif, et pour ça il utilise le genre de mots dont j’aurais peut-être du mal à saisir le sens s’ils étaient employés hors contexte.

Passées les quelques première pages, j’ai été ferrée.

Le récit est un genre de huit-clos sur un plateau. Quelques personnages dont les histoires sont imbriquées, des secrets de familles, des non-dits, des espoirs refoulés… Le tout rythmé en courts chapitres addictifs.


Voilà, il ne me reste plus qu’à découvrir les autres romans de Franck Bouysse !



vendredi 17 juin 2016

Un fils en or, de Shilpi Somaya Gowda



Traduit de l'anglais ( Inde) par Josette Chicheportiche





Le fils en or dont il est question s’appelle Anil. Etudiant en médecine et issu d’une famille nombreuse, il part faire ses armes aux Etats-Unis, dans un hôpital de Dallas.

J’ai entendu parler de ce roman pour la première fois dans une émission au cours de laquelle le célèbre libraire Gérard Collard en a dit beaucoup de bien.

J’ai refermé ce petit pavé de 457 pages hier soir avec un sentiment de grande satisfaction... Autrement dit, je me suis régalée cette semaine avec ce magnifique roman indien !

Le récit se déroule à la fois en Amérique et en Inde. La trame de l’histoire mêle en effet différents protagonistes afin de nous immerger ici ou là. C’est un roman d’une grande richesse, dense et profond qui met en exergue certains aspects des traditions indiennes, les liens familiaux et l’importance des devoirs filiaux ainsi que les conflits intergénérationnels, avec le basculement progressif vers le modernisme.


Un roman exotique plein de sensibilité que je recommande vivement à tous ceux qui aiment le Monde.




4ième de couverture :


Un fils en or Anil prenait de plus en plus conscience delà place que Leena occupait dans son esprit... Il n'avait pas réussi à l'oublier au bout de tant d'années. Il voulait la revoir, voilà ce dont il était sûr, et pour cela, il était prêt à affronter sa mère. Il l'avait laissée contrôler sa vie une fois à ce sujet, mais il ne la laisserait pas recommencer. Il suivrait ce que son cœur lui disait.

 Anil est un jeune Indien qui commence des études de médecine dans le Gujarat puis part les compléter aux États-Unis. Sa redoutable mère rêve pour lui d'une union prestigieuse. Or, depuis qu'il est petit, elle le sait très proche de Leena, la fille d'un métayer pauvre. Quand celle-ci devient une très belle jeune fille, il faut l'éloigner, en la mariant à la va-vite. Les destins croisés d'Anil et de Leena forment la trame de ce roman - lui en Amérique, qui est loin d'être l'eldorado qu'il croyait ; et elle en Inde, où sa vie sera celle de millions de femmes victimes de mariages arrangés. Ils se reverront un jour, chacun prêt à prendre sa vie en main, après beaucoup de souffrances. Mais auront-ils droit au bonheur ?

vendredi 20 mai 2016

L'autre moitié du soleil, de Chimamanda Ngozi Adichie





Après «  Americanah », ceci est le deuxième roman de cette auteure nigériane que j’ai eu le bonheur de découvrir.

Même plaisir et même passion de lecture que pour le précédent.

L’histoire romancée se déroule sur un fond historique, celui de la guerre qui a éclaté au Nigéria à la fin des années 60, suite à la déclaration d’indépendance d’une partie du pays, le Biafra.

Le Nigéria est un grand pays où se côtoient plusieurs ethnies, les unes majoritairement chrétiennes, les autres musulmanes… Les personnages principaux du récit font partie de la première catégorie et sont Igbos. Chimamanda Adichie a tissé une trame de leur vie sur une décennie, de façon à englober l’avant, pendant et l’après-guerre.

L’écriture est riche, profonde et sensible. Chaque personnage est travaillé, qu’il soit principal, secondaire ou même simplement de passage ! C’est avant tout une histoire d’amours, d’amitiés et de fraternité.

Ce roman est historiquement très intéressant, mais surtout culturellement extrêmement enrichissant. La vie de la bourgeoisie nigériane empreinte des manières de la Grande Bretagne (ancienne domination), son enrichissement et sa corruption face à une majorité de paysans qui vit dans une extrême pauvreté.

La guerre et ses ravages va précipiter les uns dans l’abime, faire fuir les autres ou encore séparer des familles sans espoir de retour…

Cette histoire est magnifique et bouleversante, et qu’elle n’a pas été ma surprise d’apprendre l’existence d’une adaptation cinématographique ! L’extrait correspond bien à ce que j’ai lu en tout cas… à voir !


Voici la bande annonce du film :


vendredi 15 avril 2016

Americanah, Chimamanda Ngozi Adichie




Ce roman fait désormais partie de mes coups de cœur, c’est dit.

L’auteure est nigériane et je pense qu’une grande partie de ce roman est autobiographique.

A travers le regard  de son héroïne, Ifemelu, elle nous entraîne à Lagos, au sud du Nigéria, où l’on se retrouve immergé dans le quotidien des gens ordinaires, partageant les moments de vie d’une lycéenne avec sa famille et ses amis.

Je ne connais pas du tout la littérature africaine en général et j’ai donc été ravie de cette première plongée au Nigéria, et avec Chimamanda Ngozi Adichie en particulier, car c’est une merveilleuse romancière, talentueuse et sensible.

Ifemelu, comme tant d’autres jeunes de sa génération, va saisir l’opportunité de pouvoir s’expatrier dans un pays anglophone. L’envie d’une vie meilleure, le besoin de s’extraire d’un avenir sans relief, de construire quelque chose, de vivre un rêve, va pousser les uns vers l’Angleterre, les autres vers l’Amérique. Pour elle ce sera l’Amérique.

J’ai trouvé très intéressant de connaître le point de vue qu’une noire africaine pouvait avoir sur les blancs américains, sur les noirs américains, sur ce que les blancs américains pensaient des noirs, (selon leur origine et la nuance de leur teint), sur ce que les noirs américains pensaient des noirs africains et ainsi de suite. Une analyse sociétale qui a le mérite de mettre en évidence tout un tas de non-dits, de paradoxes, de petites hypocrisies, de discrimination et de racisme ressentis par les uns et niés par les autres…

Le parcours du personnage principal démontre toutes les difficultés que doivent surmonter les exilés africains. Ceux  pour qui ça ne marche pas et qui restent dans la misère,  ceux pour qui le rêve devient accessible, et aussi ceux qui décident de rentrer au pays. Ces derniers se sont-ils perdus en cours de route ? Retrouveront-ils leur place dans une société qui a continué d’évoluer pendant leur absence ? Qui sont-ils devenus après toutes ces années à l’étranger ?

Vous l’aurez compris, c’est un récit extrêmement riche et profond. L’auteure transmet un témoignage lucide, parfois caustique, parfois tendre, mais toujours franc sur tout ce petit monde, qu’il soit nigérian ou occidental, sans discrimination !  

Ah j’allais oublier ! C’est avant tout un magnifique roman d’amour. Le genre d’amour romantique qui ne se rencontre que rarement, un sentiment qui résiste au temps et à la séparation. Il sera le sel de cette histoire, le fil conducteur qui m’a donné envie de lire avec avidité et passion cette œuvre jusqu’à la dernière page et m’a rendue triste au moment de refermer le livre. Difficile de se résoudre à quitter des personnages attachants au bout de 523 pages !
Mais voilà, toutes les bonnes choses ont une fin...

Bonne lecture !




lundi 4 avril 2016

Franz Kafka



Le procès, La colonie pénitentiaire, La métamorphose



Grâce à l’immersion dans ces quelques œuvres de l’auteur tchèque, j’ai clairement compris la signification de l’expression : «  une situation kafkaïenne ».

« La colonie pénitentiaire » et « La métamorphose » sont des nouvelles. « Le procès » est quant à lui  un roman court mais tous ont en commun un style bien particulier, dominé par une absurdité qui me rappelle les œuvres de l’auteur japonais Haruki Murakami. (Je me demande d’ailleurs si Murakami ne pousse pas encore plus dans l’absurde).

Kafka aborde des sujets de société et les met en scène de manière exagérée. Le tout semble illogique et complètement décalé par rapport aux normes et aux standards de nos schémas
mentaux.

L’écriture est travaillée mais la lecture est tout à fait abordable malgré quelques longueurs, notamment dans « Le procès », où l’auteur s’appesantit un peu trop à mon goût dans ses explications sans queue ni tête.  

Dans ces œuvres il y a de l’humour et de la légèreté, car beaucoup de situations prêtent à sourire, mais au final je dirais quand-même que ces histoires sont tragiques, tout en étant racontées de manière amusante… pour rester dans l’absurdité jusqu’au bout.

J’ai été contente de découvrir l’univers de Franz Kafka et je compte bien prolonger ma lecture avec «  Le château ». A suivre…


 

lundi 28 mars 2016

Charles repousse la nuit, P.A Thevenet




Attention, bombe en approche !!!

Premier roman de Pierre Adrien Thevenet, mais pas premier écrit. Il a en effet déjà publié un recueil de nouvelles sous un pseudonyme. Il s’agit de Four Steps, de François Mulcahy.

J’ai eu le plaisir de lire Four Steps il y a 2 ans, et j’avais déjà à l’époque reconnu le talent de ce jeune auteur. Sachant qu’il cherchait à publier son premier roman, j’avais hâte de le découvrir. C’est chose faite !

« Charles repousse la nuit » est un récit fantastique planté sur un décor que l’on pourrait qualifier de post-apocalyptique. Cette histoire m’a tenue en haleine dès les premières phrases et ne m’a plus lâchée jusqu’aux derniers mots de l’épilogue.  

Les premiers romans des jeunes auteurs ont souvent quelques petites choses à améliorer, à approfondir ou au contraire délaisser. Mais là je dois dire que tout y est, rien à redire…c’est parfait.

Comme à son habitude, P-A Thevenet développe largement le côté psychologique de ses personnages, ce qui donne toute sa profondeur à l’œuvre. Chacun a une personnalité bien marquée, avec ses aspérités, son relief, ses petits secrets…tout cela aide le lecteur à se relier au récit, à vivre l’aventure, à se sentir en empathie avec le ou les personnages principaux.

A côté de ça, l’auteur a su maintenir un suspens sans aucun temps mort, aucune lourdeur ni ennui tout au long des pages. Une plume dynamique et travaillée qui transmet tout un éventail d’émotions, allant de la joie à la tristesse, en passant par le doute et même l’effroi pour certaines scènes.

En arrière-plan de l’histoire, on peut noter la passion de l’auteur pour la musique et le cinéma (mais surtout la musique, dans une certaines ambiance d’antan) et je ne pense pas me tromper en faisant cette remarque, pour l’avoir déjà ressentie dans certaines de ses nouvelles de Four Steps.

Pour finir, je dois signaler que cette histoire fantastique a une forte valeur symbolique. Il y a donc une morale à en tirer, voire plusieurs…

Bref, un très beau roman qui reflète un immense talent, et qui mérite d’être remarqué par une grande maison d’édition, afin d’être largement diffusé, pour le plus grand bonheur des lecteurs !




dimanche 27 mars 2016

L'empire de la honte, Jean Ziegler





L'auteur suisse met ici en lumière des vérités qu'il est bon de connaitre..
Quelles sont les forces qui gouvernent notre monde? Comment agissent-elles? Y a-t-il, pour les pays les plus pauvres, un moyen d'y échapper?

On pense savoir certaines choses, avec plus ou moins de clarté, mais il est très utile quelques fois de s'y pencher de plus près, d'approfondir ses connaissances, d'ouvrir l’œil...

J'ai choisi de copier une partie du chapitre sur la dette, parce que je l'ai trouvée très " parlante". Elle montre bien ce qui se joue sur l'échiquier mondial:



Le Rwanda: Dette odieuse 



D’avril à juin 1994, sur les collines du Rwanda, les soldats de l’armée régulière et des miliciens interhamwe (en banyarwanda, Interhamwe veut dire «  ceux qui tuent ensemble ») assassinèrent systématiquement les enfants, femmes et hommes de l’ethnie tutsi, ainsi que des milliers de Hutus opposés au régime.

A cette époque, les Nations unies maintenaient au Rwanda un contingent de Casques bleus de plus de 1300 hommes retranché dans des camps militaires protégés par des barbelés, ici et là à travers le pays.

A l’heure des massacres, des dizaines de milliers de Tutsis implorèrent l’aide des Casques bleus, demandant à pouvoir se réfugier dans les camps sécurisés. Mais les officiers onusiens refusèrent avec constance. Les ordres venaient de New York, du Conseil de sécurité, par l’intermédiaire du sous-secrétaire général au maintien de la paix, Kofi Annan.

Alors que le génocide avait commencé, la résolution n° 912 du 21 avril 1994 du Conseil de sécurité réduisit même de moitié le nombre des soldats au Rwanda.

Entre 800 000 et 1 million de femmes, de nourrissons, d’enfants, d’adolescents et d’hommes tutsis (et hutus au sud) furent ainsi massacrés en cent jours. Sous l’œil impassible des Casques bleus des Nations unies.

De 1990 à 1994, les principaux fournisseurs d’armes et de crédits au Rwanda avaient été la France, l’Egypte, l’Afrique du Sud, la Belgique et la République populaire de Chine. Les livraisons d’armes égyptiennes étaient garanties par le Crédit Lyonnais. L’aide financière directe venait surtout de France.  De 1993 à 1994, la République populaire de Chine avait fourni 500 000 machettes au régime de Kigali. Des caisses pleines de machettes, payées sur crédit français, arrivaient encore par camions, venant de Kampala et du port de Mombassa, alors que le génocide avait déjà commencé…

Les génocidaires furent finalement défaits par l’avancée de l’armée du Front patriotique rwandais, constitué par de jeunes Tutsis issus de la diaspora ougandaise. Kigali fut prise en juillet 1994. La France, pourtant, continua à livrer des armes, par Goma et le Nord-Kivu, aux derniers génocidaires réfugiés sur la rive orientale du lac Kivu.

La France de François Mitterrand a joué, au Rwanda, un rôle particulièrement néfaste. Des officiers français ont soutenu et, le jour de la défaite venu, exfiltré les génocidaires et leurs commanditaires politiques.

Les analystes qui font autorité l’expliquent ainsi. La dictature hutu du président Habyarimana était un régime francophone ; le Front national rwandais, qui le combattait, était constitué majoritairement par des fils et des filles de réfugiés tutsis, nés en Ouganda, et donc anglophones.  C’est au nom de la défense de la francophonie que François Mitterrand accorda un soutien sans faille aux tueurs génocidaires. En outre, des liens d’amitié attachaient le président français à la famille du défunt dictateur hutu rwandais, Juvénal Habyarimana.

Le nouveau gouvernement a hérité d’une dette extérieure d’un peu plus d’un milliard de dollars. Arrivant au pouvoir dans un pays complètement dévasté et considérant qu’ils n’avaient aucune obligation morale à rembourser des crédits qui avaient servi à financer l’achat des machettes avec lesquelles on avait découpé leurs mères, frères et enfants, les nouveaux gouvernants demandèrent aux créanciers de suspendre, voire d’annuler, le remboursement. Mais, conduit par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, le cartel des créanciers refusa finalement tout arrangement, menaçant de bloquer des crédits de coopération et d’isoler financièrement le Rwanda dans le monde.

C’est ainsi que les paysans rwandais, pauvres comme  Job, et les rares rescapés du génocide s’échinent aujourd’hui encore à rembourser, mois après mois, aux puissances étrangères les sommes qui ont servi aux massacres.






dimanche 20 mars 2016

L’Évangile du Serpent, de Pierre Bordage





Voici un roman d’anticipation dont le thème principal est plus que jamais d’actualité…

Pierre Bordage semble familier des pavés et comme à chaque fois on arrive aux dernières pages en se demandant : «  Quoi, c’est déjà la fin ? » ben oui, c’est du Bordage, prenant, fluide, beau.

Il a tissé la toile de vie de quatre personnages principaux et les a fait évoluer sur la trame de l’existence. Tous différents en âges, de milieux sociaux et d’aspirations variées. Tous vont se retrouver dans la lumière d’un maître spirituel, qui représente symboliquement ce que tout être humain doit ou devrait vouloir retrouver s’il n’était pas paralysé par ses peurs, conditionné par ses carcans éducatifs et sociaux.  La liberté et une vie harmonieuse avec le reste de l’univers.

Parallèlement à cela, il aborde les aspects détestables de nos sociétés «  civilisées », et je me dis que c’est drôle comme les lectures peuvent parfois coïncider… En ce moment je lis également «  L’empire de la honte » de Jean Ziegler. Ce n’est pas un roman mais une analyse du schéma de fonctionnement de notre monde, très instructif. J’y reviendrai…

L'Évangile du Serpent est le premier volet d’une trilogie : L’Ange de l’abîme et Les chemins de Damas. Un thème général les relie mais ils se lisent indépendamment… Je m’y plongerai donc prochainement.


Bonne découverte ! 

lundi 15 février 2016

Le voyage dans le passé, de Stefan Zweig




Troisième rendez-vous avec Stefan Zweig, après «  La confusion des sentiments » et «  Le jouer d’échecs ». Toujours autant de plaisir à retrouver sa belle plume, élégante, sensible, pleine de pudeur mais tellement profonde dans les émotions qu’elle nous transmet…

Il s’agit ici d’une nouvelle de moins de 70 pages. Courte, mais qui se suffit en elle-même. Tout est dit.
Une magnifique histoire d’un amour contrarié, impossible, suivi d’une longue séparation, puis de retrouvailles. Un passé rêvé, ruminé puis traîné dans un présent décalé et terni.

L’auteur, comme à son habitude, nous livre une analyse très fine des sentiments et conflits intérieurs de son personnage principal, avec beaucoup de douceur et de psychologie.









Extrait

" ... l'amour ne devient vraiment lui-même qu'à partir du moment où il cesse de flotter, douloureux et sombre, comme un embryon, à l'intérieur du corps, et qu'il ose se nommer, s'avouer du souffle et des lèvres. Un tel sentiment a tant de mal à sortir de sa chrysalide, qu'un heure défait toujours d'un coup le cocon emmêlé et qu'ensuite, tombant de tout son haut dans les plus profonds abîmes, il s'abat, avec une force décuplée, sur un cœur terrorisé." 



lundi 8 février 2016

Ce que le jour doit à la nuit, de Yasmina Khadra




Après «  Qu’attendent les singes », il s’agit ici de mon deuxième roman de Yasmina Khadra, dont j’entends parler en bien depuis pas mal de temps.

Autant le premier m’avait divertie sans spécialement me toucher (il s’agit d’un thriller politique), autant celui-ci m’a profondément bouleversée.

L’histoire s’articule principalement autour des liens qui se tissent durant l’enfance. Le récit de cet enfant, Younes, dit Jonas, regarde tous ceux qui ont «  le cul entre deux chaises » pour reprendre les termes de l’auteur. Un petit algérien aux yeux bleus, recueilli par son oncle qui est marié à une roumia (une française). Il va grandir dans une double culture, va se lier d’amitié avec ceux qui seront considérés plus tard comme des « pieds noirs ». Constamment entre deux eaux, incapable de se situer fermement dans un camp et rejeter l’autre, il sera un pont entre deux rives.
Yasmina Khadra a multiplié les paradoxes, le prénom francisé, les traits physiques, les situations…

Finalement tout est-il simplement une question d’étiquette ? Un post-it apposé sur le front à la naissance ?
Si une amitié fraternelle a la chance de voir le jour durant l’enfance, elle peut transcender toutes les différences, culturelles ou religieuses. Elle peut renverser la rigidité et l’inflexibilité qui caractérise l’âge adulte, les préjugés, les vieilles haines et même le besoin de liberté.


Ce que le jour doit à la nuit est un roman profondément humain et fraternel, que l’on soit «  le cul entre deux chaises » ou pas. Ce récit touche à quelque chose de profondément enfoui en chacun de nous, ce besoin de se lier, de comprendre et d’être compris par l’autre.