samedi 24 décembre 2016

Si la lune éclaire nos pas, de Nadia Hashimi





Deuxième roman de cette auteure américaine d’origine afghane, après «  La Perle et la Coquille » que j’ai beaucoup aimé.

Même sentiment pour cette histoire à l’écriture profondément humaniste, sensible et touchante.

Le récit débute à Kaboul et se transporte ensuite à travers des chemins d’exil jusqu’en Angleterre. C’est l’histoire d’une famille afghane jetée dans l’inconnu, obligée de tout laisser derrière elle pour sauver sa vie, espérer un avenir meilleur que celui qui lui est promis sous le régime des Talibans.

Tout ça est terriblement d’actualité, c’est l’histoire de milliers de réfugiés à travers le monde, tous ces gens qui décident, bien souvent malgré eux, de tenter un coup de poker, de tout recommencer dans un pays de paix, en laissant tout ce qu’ils possèdent derrière eux.
Ils sont souvent considérés comme des cheveux sur la soupe dans des sociétés ayant déjà ses propres difficultés. Mais quand l’horizon est totalement bouché, qu’on tremble tous les jours, qu’on vit la boule au ventre dans l’attente d’une incursion agressive et d’une exécution, il ne reste que la fuite, ailleurs, loin, peu importe les difficultés, les dangers, peut-être même la mort, tout sauf l’immobilité résignée.

A travers une famille afghane, Nadia Hashimi nous entraîne dans le quotidien des sans-papiers clandestins, leurs misères, la crainte permanente d’être renvoyés à leur point de départ, démunis, séparés des leurs, perdus.

Ce roman est aussi une incroyable leçon de courage, de persévérance, de foi et d’amour. Le besoin de survie, d’espérer et de retrouver sa famille peut insuffler la force de déplacer des montagnes, même pour un enfant…







vendredi 16 décembre 2016

La Perle et la Coquille, de Nadia Hashimi




Nadia Hashimi rejoint désormais le rang des écrivains afghans de talent, aux côtés de Khaled Hosseini.

Je me revois la semaine dernière, dans ma médiathèque, avec les deux romans de Nadia Hashimi, en train de dire «  de sacrés pavés ! » à l’attention de l’employée qui m’a répondu : «  ah mais quand c’est passionnant on ne voit pas les pages défiler ! ».

Hé bien oui, ce fut le cas pour La Perle et la Coquille. Je n’ai pas senti le poids du pavé tellement sa lecture a été prenante.

Un magnifique roman de femme, pour les femmes. Les afghanes et les autres. Toutes celles qui vivent dans une société patriarcale, où leur existence est tolérée à condition qu’elles remplissent leur part de marché, engendrer des fils…

Sans enfants, elles ne sont que fardeaux, des bouches de plus à nourrir. Celles-là ont un avenir tout tracé, celui d’être des domestiques. Quoique, même mariées et mères elles le sont, des domestiques, pour leur époux, leur belle-mère, les autres épouses. Une vie de labeur entre quatre murs, usées et maltraitées.
Lorsque des traditions sont aussi ancrées dans une société, il est très difficile d’en sortir, surtout quand tout contribue à maintenir un carcan en place. La faute aux hommes qui ont peur de se faire doubler, mais aussi aux femmes qui perpétuent ce qu’elles ont vécu, comme si leur destin était immuable.

Cette histoire relate tour à tour un morceau de vie de deux femmes, l’une ayant vécu au début du 20ième siècle, et celui de son arrière-arrière-petite- fille. En un siècle peu de choses ont changé dans le quotidien de la majorité des afghanes. Toujours les mêmes obligations, la même obéissance, la même soumission.

Le mérite de ce livre est aussi de m’avoir fait connaitre la tradition du «  bacha posh », qui consiste à déguiser de petites filles en garçons, dans les familles qui ont eu le grand malheur de ne pas avoir de fils, afin qu’elles puissent  accomplir certaines choses normalement interdites aux filles. Aider à faire les courses, travailler, escorter leurs sœurs si elles doivent sortir de la maison..

Etre bacha posh est une fenêtre de liberté pour ces fillettes qui goûtent enfin au monde des garçons. Tour leur est alors possible : courir dans la rue, jouer au ballon, aller à l’école et plus de corvées domestiques.

Mais comme toutes les bonnes choses ont une fin, il faut un jour redevenir fille, avec tout ce que cela implique. Il faut alors apprendre à être femme et se préparer au mariage.

Certaines scènes dans ce roman sont très dures, cruelles, poignantes, à l’image de ces vies malmenées. C’est un vibrant témoignage de tous ces destins qui se répètent, mais c’est aussi un hommage à la force et au courage des femmes qui osent relever la tête, celles qui veulent un avenir meilleur pour leurs filles, celles qui bravent l’ordre établi pour gagner un morceau de liberté.

Merci à Nadia Hashimi d’avoir été le porte-parole de ces millions d’ombres bleues réduites au silence…