samedi 28 avril 2018

Plum




Assise depuis ce qui lui semble être des heures, elle le contemple depuis sa véranda. L'arbre.

Incapable d’en détacher ses yeux, elle sombre petit à petit dans un état second, à mi-chemin entre le rêve et l’éveil, tétanisée, vidée de toute volonté d’agir.

Vieille, courbée, les cristallins de plus en plus opaques, elle voit le monde à travers un voile de brume. Pourtant, elle est sur le point de réaliser son vœu le plus cher, celui de toute une vie.

Plum a consacré son existence à la confection de confitures. Elle en a fait un art, améliorant ses recettes, sélectionnant les meilleurs fruits et acquis une solide réputation de qualité à travers toute la région, et même au-delà.

Mais Plum a une particularité : les seuls fruits qui trouvent grâce à ses yeux sont les mirabelles, les reines-claudes et les quetsches. Rien d’autre.

Pourquoi ? Elle-même ne le sait pas. Elle est comme ça, Plum, elle a des obsessions inexpliquées.

C’est comme pour les couleurs, elle n’aime que le rouge profond, le rouge pourpre, rien d’autre.

L’arbre qu’elle contemple en ce moment la remplit de joie, car il a les feuilles de ce rouge tant aimé.
Il donne des fruits aussi, en été, mais elle préfère ne pas y toucher, c’est pour les oiseaux. Ce qu’elle préfère c’est le mois d’avril, car il fleurit et lui rappelle le hanami du pays de ses ancêtres.

Arrivée à l’hiver de sa vie, elle a décidé de tout laisser derrière elle, et de faire Le voyage de retour, celui qui la ramènera vers cette terre inconnue mais tant désirée, le Japon.

Un son strident la sort de sa torpeur, lui rappelle qu’il est l’heure d’y aller.

C’est le taxi.

Elle se lève péniblement, ramasse sa petite valise posée devant l’entrée et s’apprête à le rejoindre. 

Soudain, son regard se fige. Perplexe, elle le regarde longuement, un sourire amusé sur les lèvres.

C’est bien la première fois qu’elle voit un taxi de cette couleur-là !

Une joie enfantine s’empare d’elle. Pour son dernier voyage, tout sera assorti à son prénom !

Prune.




1001 citations dont il faut s'inspirer dans la vie





C’est la première fois que je participe à une opération «  Masse critique » Babélio  pour tenter de gagner un beau livre, et j’ai été bien étonnée de le découvrir, tellement il est énorme ! (vais-je seulement réussir à lui trouver une place dans une de mes bibliothèques ??)

Petite présentation de cette petite (grosse) merveille :
21 x 16 cm, et presque 6 cm d’épaisseur avec 960 pages.

24 collaborateurs ont participé à l’élaboration de ce livre, sous la direction de Robert Arp. J’imagine bien la montagne de travail que cela a dû demandé.

Les citations et proverbes ont judicieusement été répartis en plusieurs catégories, comme : Vie et Mort, Religion, Education, Science et Nature… etc.  Bien pratique quand on cherche l’inspiration dans un domaine en particulier.

En feuilletant ce beau pavé, on découvre une multitude d’illustrations : photos, peintures, dessins, gravures. Tout cela contribue à enrichir les explications données sous chaque citation ou proverbe.

Parlons-en justement, de ces 1001 citations. Comme beaucoup de personnes, je me sens inspirée par ces petite phrases connues, qui sonnent bien et qui ont le mérite de résumer en quelques mots choisis mes pensées ou émotions du moment. Certaines peuvent se révéler être de véritables moteurs dans la vie, comme des mantras qu’il est bon de se répéter dans les moments difficiles, ou lorsque l’on a besoin d’un coup de fouet pour continuer à avancer.

Ce qui fait la valeur de ce recueil, c’est qu’il ne se contente pas de balancer des proverbes au vent. Chacun est situé, dans le temps et/ou géographiquement, et son auteur identifié, le tout accompagné d’une présentation du personnage et du contexte dans lequel ce proverbe a été prononcé.

Même lorsque l’auteur est inconnu, il y a une explication sur le contexte probable et une restitution historique entourant la fameuse phrase.

Connaitre des citations c’est bien, mais en connaitre l’origine c’est mieux ! De quoi étancher ma soif de connaissance et ma curiosité sans bornes.  

Quelques photos pour finir :







vendredi 27 avril 2018

L'arbre et la chaise, ou les trois vies du bois



Première vie:

C'est un bel arbre, majestueux, déployant ses branches sans complexes, vivant pour lui même, à la recherche du soleil et abritant la vie.
Il fleurit, il offre des fruits, il ravit l’œil et on aime se reposer sous son ombre protectrice et rafraîchissante.
On s'intéresse à son nom, ses particularités, ses besoins, ses faiblesses.
L'intérêt et l'admiration que nous lui portons est tout ce qu'il y a de plus sincère.
Bref, il incarne la beauté, la force, l'énergie de la vie et nous l'aimons.

Deuxième vie:

C'est l'étape de la chaise...
Hé oui, on aime aussi les arbres pour leur utilité. Entre autres pour la fabrication des chaises.
Parlons donc de cette chaise, rustique, d'une belle couleur brute et surtout qui est bien pratique.
On ne peut pas s'en passer.
Fraîchement achetée, on l'admire, on la dépoussière, on fait attention de ne pas l’abîmer.
A ce stade, elle incarne aussi la beauté et l'utilité, bien que la balance penche plus vers l'utilité.


Entre la deuxième et la troisième vie:

Une période plus ou moins longue marque le désintérêt croissant que nous avons envers cette chaise..
Fini l'émotion de la découverte. Elle est là, elle sert, mais elle porte les marques du temps.. Et puis on en a un peu marre de la voir, toujours le même look, la même gueule.


Troisième vie:

Là c'est le ras le bol.
Nos envies ont changé, la mode aussi..
On lui offre deux options, à cette chaise: soit elle va se mettre dans un coin , loin des yeux, soit elle part à la déchetterie.

Voilà l'histoire des trois vies du bois.
Quelques fois elle s'applique même aux hommes.



jeudi 19 avril 2018

L'aile des vierges, de Laurence Peyrin




Laurence, ma chère, vous avez encore accompli des merveilles !

Je ne lis habituellement pas de romans d’amour. Pas trop ma tasse de thé.

Mais, car il y a un mais, je suis fan des romans de Laurence Peyrin. Je les ai tous lus. Et je sais par expérience qu’elle ne verse pas dans les pralines roses. Donc ça me va !

L’histoire de Maggie est une histoire d’amour, mais pas que.

Le contexte de l’après-guerre, la lutte des classes, le besoin de reconnaissance sociale, les revendications pour les droits en général et féminins en particulier, construisent une toile qui enrichit (et complique) le noyau sentimental de notre héroïne. 

C’est bien écrit, prenant, passionnant et historiquement documenté.

Que le chemin a été long dans l’histoire des droits des femmes ! Maggie nous donne une bonne leçon de persévérance, de force mais aussi d’abandon, parfois, pour mieux se retrouver soi-même…

J’ai refermé ce roman en ayant le sentiment d’avoir eu une grande bouffée de romantisme, et ça fait du bien.

Bonne lecture.





4 ième de couverture:


Doit-on trahir ses convictions et ses rêves
pour un peu de bonheur personnel ?
Un extraordinaire portrait de femme libre

Angleterre, avril 1946. La jeune femme qui remonte l’allée de Sheperd House, majestueux manoir du Kent, a le cœur lourd. Car aujourd’hui, Maggie O’Neill, un fort caractère, petite-fille d’une des premières suffragettes, fille d’une féministe active, va entrer comme bonne au service des très riches Lyon-Thorpe. Et la seule consolation de Maggie est que personne ne soit là pour assister à sa déchéance, elle qui rêvait de partir en Amérique et d’y devenir médecin. Qui en rêve toujours, d’ailleurs.
L’intégration parmi la dizaine de domestiques vivant comme au siècle précédent est difficile pour Maggie. Elle trouve ridicules les préoccupations et exigences de Madame, surnommée par ses employés « Pippa-ma-chère », car c’est ainsi que ses amies l’appellent à grand renfort de voix haut perchées. Le maître de maison, lointain, l’indiffère. Seul trouve grâce à ses yeux le vieux lord, âgé de près de cent ans, qui perd la tête et la confond avec une mystérieuse Clemmie à qui il déclare son amour. 
Mais Maggie va bientôt découvrir que le maître de maison, John Lyon-Thorpe, est loin d’être l’héritier phallocrate qu’elle imaginait. Ils entament une liaison passionnée. Comme elle, John est prisonnier de son destin, et veut s’en libérer. Il a grandi en Afrique, où son père avait une immense propriété, et compte y retourner. Il éprouve les mêmes envies d’ailleurs que Maggie, le besoin de se sentir vivant.
Et du jour où elle s’avoue son amour pour John, Maggie comprend qu’elle va devoir choisir entre la promesse du bonheur et son aspiration à la liberté. 

mercredi 11 avril 2018

Les affinités, Robert Charles Wilson






Voilà un roman de science-fiction et d’anticipation qui est tout à fait dans l’air du temps, présent et à venir.

Ça parle des réseaux sociaux et de la catégorisation de leurs membres par affinités.
L’histoire construite par l’auteur est en réalité une étude sociétale, et tente d’expliquer pourquoi nous sommes quasiment tous connectés à ces réseaux.

Pourquoi ce besoin de rejoindre ou de se créer un groupe d’amis ? Et pourquoi, quand on se retrouve en dehors on replonge aussi sec ? Les moyens technologiques modernes exercent-ils une attraction irrésistible qui nous pousse à faire comme tout le monde, à s’insérer dans un groupe de personnes qui partage les mêmes valeurs ? Un genre de famille élargie dans laquelle on se sentirait bien ? Sur qui on pourrait compter au cas où ?

La vie nous paraîtrait-elle vide ou morne si on ne se sentait pas «  inclus » quelque part ?

Le récit dont il est question ici va plus loin encore, car il pose la question de possibles dérives liées à une évaluation scientifique et sociologique, qui désignerait avec certitude nos tendances et nous classerait par affinités.

L’être humain est un animal social, pas de doute. Même les solitaires ont besoin d’un minimum de contacts avec leurs congénères. Mais l’homme aime généralement mieux côtoyer des gens qui lui ressemblent, en qui il pense pouvoir avoir confiance, et en qui il a le moins de risques d’être déçu.

Autrement dit, il a tendance à se retrancher dans son cocon, en excluant ceux qu’il juge «  pas sur la même longueur d’onde », qui sont par définition peu fiables, et qui font peur finalement.

Cet animal moderne a aussi tendance à être frileux, et s’il a le choix entre un chemin balisé et un autre hasardeux, il va choisir le balisé. C’est plus rassurant et on risque moins d’y laisser des plumes.

Pour en revenir au roman, je l’ai trouvé passionnant. Voilà, un seul mot, passionnant.